Petit chat joueur de mots, je pelote mes poésies de caresses câlines et je griffe parfois pour défendre les maux. J'écris le "je", le "nous", le "vous" et je ronronne souvent sous l'effleure de ma plume. J'invente, je tente... Juste pour le plaisir.

Fines moustaches et libres pensées... Je guette la rime et vous partage mon petit coup de patte.

Je ne suis pas un écrivain... Je suis le chat "couseur de mots" et vous êtes... mes petites souris inspiratrices.

samedi 26 mars 2016

Sous les cendres naissent les plus belles histoires (Extrait)

Le paysage n’est plus qu’une terre violée sous le pas lourd des chenilles enragées. Les arbres outrageusement déshabillés par les larmes des lance-flammes vomissent leurs cendres sur un avenir à jamais transformé. Les corps des oiseaux pendent à leurs branches faméliques comme les boules colorées, qui jadis, chatouillaient les épines du sapin lors des veillées insouciantes des soirs de noël. La neige tente quelques flocons mais, la douceur de cette fin d’hiver les transforme immédiatement en perles d’eau qui sombrent la terre dans une épaisse boue poisseuse. Tout semble figé. Seule l’horloge tic-tac son temps dans l’infernal écho d’une campagne endormie. Les corbeaux ne croassent même plus et le ciel vidé résonne encore du vacarme des avions de combat. Le vent même, n’ose plus, souffler sa légèreté sur la plaine massacrée.

Au milieu de cette désolation, s’élèvent encore fièrement, les couleurs ternies d’un vieux cirque de province. Son chapiteau semble crever un nuage, mais il ne fait que l’effleurer dans l’impalpable de son toucher. Sur la piste de sable, le clown écoute le silence, là, où hier encore, s’entrechoquaient les rires et les applaudissements de dizaines de villageois… Encore vivants. Assis sur la grosse caisse muette de l’homme tambour, les épaules voûtées, il regarde amèrement les chaises amputées de la foule bruyante, comme le triste décor d’un théâtre oublié. Sous son masque de peinture à moitié effacé du ruisseau de ses yeux, il suicide l’Auguste aux burlesques sourires et devient ce clown blanc, nostalgique Pierrot au visage lunaire. A présent il joue seul de sa solitude comme le funambule apprivoise le fil de son équilibre. Son vieil ami, le contre-pitre, s’est endormi sous les rafales des mitrailleuses sans humours, quand dans une dernière bouffonnerie, il s’est moqué du couvre-feu. La marguerite sur son costume coloré n’arrosera plus que son cercueil en mauvais bois grimé. Mais juste avant de s’effondrer sur le pavé humide et froid, son rouge sang a dessiné sur le mur sombre de la rue, un beau sourire comme un dernier clin d’œil à la vie ou peut-être bien aussi comme une grimace cocasse à une mort bien trop sérieuse.


Le vieux clown s’essouffle à trop penser et abandonne sa tête contre ses mains désabusées. Dehors, l’étrange silence s’écrit sur fond de brouillard et au loin, très loin, des dizaines de bombes crachent la mort sur de nouveaux paysages.

¤ Cat ¤ 26/03/2016

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