Voici un magnifique texte de mon amie Aubrée, écrit à l'occasion d'un atelier d'écriture... Bonne découverte et surtout bonne lecture...
Solitude au milieu de ce champ. Isolé dans son monde inondé
de lumière, il trône en roi sur une cour
de nains. Il jette ses élans au gré du vent, semant ses ordres au fil
des nuages bleus. Nul n’entend. En silencieuses injonctions, il parle le langage
du blanc zéphyr et éructe ses désirs et ses souhaits en ondes incolores.
Pourtant, il plonge son âme au creux noir de la terre. Il
y injecte son sang en écarlates tourbillons
vivants et puise son ardeur au cœur d’un humus vibrant d’énergie. Le flux vert
incessant s’élève et grandit, pousse et croît au rythme des saisons.
Imposant, torturé, immense de sa majesté vivante, il vit là
entre ciel et terre depuis plus longtemps qu’il ne saurait le dire. Immobile en
un monde mouvant de vibrations ténues, il pose son regard impassible sur ses
contemporains qui s’activent à de
futiles choses dont il ne veut rien savoir. Seul, en son écorce enfermé, il
préside le royaume des lueurs et des obscurités d’une nature oubliée.
Solitaire, il perpétue la vie de sève irriguée.
Qu’attend-il ? Rien. Que pense-t-il ? Rien. Que vit-il ?
Tout.
Il vit de ces heures fanées où l’enfant venait le caresser.
De ces instants de joie où le paysan s’appuyait à lui, dans son ombre, pour se reposer. De ces moments futiles où la
bergère lui donnait un baiser.
Il vit de ces futurs bonheurs inscrits dans le bleuet à
naître au soleil. De la pluie bienfaitrice sur le blé en herbe. De la colonie
de fourmis qui viendra tout à l’heure.
Il respire de chlorophylle et il inspire d’oxygène. Il
creuse au fond des entrailles ténébreuses du monde et s’implante au plus
profond de Gaïa. Il avance vers le céleste et lumineux refuge et grandit à la
source de Ra.
Force immuable, il donne l’exemple d’un parcours immobile et
pourtant primordial.
D’un trajet qu’aucun doute ne perturbe. D’une voie tracée
vers l’infini du ciel mais puisant sa source au feu de l’essentiel.
Aubrée ©
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